dimanche 1 décembre 2013
Compte rendu du café philo du 29 novembre 2013 – Interprétation, connaissance.
Nous
étions quarante-huit personnes à participer à ce café philo, le vendredi 29
novembre 2013, au centre culturel
de Bouffémont, sur le thème : « Interprète-t-on à défaut de
connaître ? » qui était
un des sujets philo du bac en juin 2013.Une dizaine d'élèves de classe de seconde du centre médical et pédagogique Jacques Arnaud de Bouffémont ont participé avec leurs professeurs.
L’assemblée
a sélectionné par votes, parmi quatorze propositions, les sujets des prochains
cafés philo de Bouffémont.
Vendredi
31 janvier 2014 à 20 h 45 : « La vulnérabilité est-elle signe d’humanité ? »
Vendredi
28 février 2014 à 20 h 45 : « Pourquoi le beau nous fascine-t-il ? »
Vendredi
28 mars 2014 à 20 h 45 : « Faut-il toujours rechercher la vérité ? »
Outre
les contributions habituelles de Catherine Delaunay et de Pierre Haller,
Arlette Coutin a lu un poème de sa composition « Réflexions sur la mort ». Il est reproduit à la fin de
cet article.
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Contribution de Pierre Haller
« Interprète-t-on à défaut de connaître ? »
Champs sémantiques :
Interpréter :
représenter, expliquer, clarifier, donner du sens, comprendre, traduire,
deviner, travestir, déformer, jouer, subjectiver.
Connaître :
représenter, comprendre, savoir, éprouver, expérimenter, souffrir, être
compétent, être conscient, être au courant, connaître quelqu’un, objectiver.
Problématique : interpréter et
connaître sont-ils antinomiques ?
Les multiples domaines de l’interprétation
En
linguistique, interpréter, c’est donner un sens à un signe, à un geste ou à
une parole.
En
psychanalyse, l'interprétation du ressenti du patient par lui-même et par
l’analyste est le fil conducteur de la cure psychanalytique. Pour le
psychanalyste Sigmund
Freud (1856-1939), les pensées du rêve et le contenu du rêve sont comme
deux exposés des mêmes faits en deux langues différentes.
L’ herméneutique,
cherche à interpréter le sens d'un texte en allant au-delà du sens littéral,
pour trouver les sens cachés, spirituels ou allégoriques. L’exégèse est une étude
approfondie et critique d'un texte profane, mythologique, littéraire, poétique
ou sacré qui relève autant de sa connaissance objective détaillée (origine,
histoire, style) que de son interprétation.
En
droit, bien que nul ne soit censé ignorer la loi, celle-ci, à cause de sa
complexité, doit être interprétée par des professionnels et des autorités.
La
traduction d’un discours ou d’un texte d’une langue à l’autre implique des
connaissances précises des deux langues, mais n’exclut pas des interprétations.
Les traductions peuvent trahir le sens ou le faire glisser, mais aussi le
l’enrichir car les champs sémantiques des mots peuvent être différents d’une
langue à l’autre. Par exemple, le concept philosophique occidental de
« conscience de soi » est traduit en japonais en « éveil à
soi ».
L’artiste
interprète le réel ou des œuvres d’auteur. Dans les différents domaines des
arts (musique, danse, théâtre) l’exécutant ou l’artiste interprète en rendant
audible ou visible dans son style propre la création d’un auteur. Le musicien
interprète Mozart, l’acteur interprète Sophocle. L’auteur interprète le monde.
En
informatique, l’exécution des programmes est une suite itérative mécanique
d’interprétations codifiées de signaux électriques.
En
médecine, le diagnostic est l’interprétation de signes cliniques, de
résultats d’analyses ou d’imageries médicales. Ces interprétations sont basées
sur des connaissances généralement normalisées, parfois intuitives. L’intuition
émerge de la connaissance.
En
philosophie. Les jugements de valeur et les jugements moraux sont de
l’ordre de l’interprétation. La nécessité de l’interprétation s’impose parce
que bien souvent le sens des choses ne va pas de soi. Il faut recourir à
l’interprétation pour entrevoir l’implicite.
Les multiples domaines de la connaissance.
+
Les connaissances humaines, leur nature et leur variété, la façon dont elles
sont acquises, leur valeur et leur rôle dans les sociétés, sont étudiées et
codifiées par une diversité de disciplines telles que la science, les
techniques, l'épistémologie, la philosophie, la psychologie, les sciences
cognitives, l'anthropologie, la sociologie, l’histoire, la politique,
l’économie. Chacun de ces domaines définit des normes d’acquisitions et
d’utilisation de ses connaissances spécifiques.
+
Les critères de la rationalité scientifique reposent sur l’observation, la
description de la réalité par des modèles qui ne dépendent pas en principe de
l’observateur. Une théorie doit être réfutable (falsifiable) selon le philosophe Karl Popper (1902-1994).
+
Les sciences humaines, pour asseoir leur crédibilité font appel à des
instruments mathématiques comme les statistiques.
+
Les modèles de connaissances des sciences dites exactes fonctionnent à des
échelles de temps, d’espace et d’organisation de la matière spécifique. Les
connaissances relatives à la mécanique des corps physique sont différentes aux
niveaux de l’infiniment petit, de notre taille humaine ou de l’infiniment grand
de l’univers.
Nos connaissances scientifiques en dehors de nos échelles de
perceptions sensorielles nécessitent des instruments de mesure tels que les
accélérateurs de particules, les microscopes, les détecteurs divers, les IRM,
les télescopes, les satellites. Ces appareils ne restituent qu’une partie des
caractéristiques des phénomènes. Ces caractéristiques font ensuite l’objet
d’interprétations par les scientifiques, par exemples les modèles standard des
particules élémentaire ou de la structure de l’univers.
+ Un
modèle scientifique n’est valable qu’à l’intérieur de ses frontières
d’observation spécifiques.
+ Le
fonctionnement des objets technologiques apporte la preuve de la validité de
nos connaissances à leur échelle de taille. Même si nous ne savons pas ce
qu’est fondamentalement un champ électromagnétique, nous savons utiliser ses
propriétés pour transmettre des informations ou fabriquer, transporter et
utiliser de l’énergie électrique. Le fonctionnement des ordinateurs est la
preuve de la validité de nos modèles de comportement de la matière
semi-conductrice au niveau microscopique et invisible des électrons.
+
Les connaissances sont implicites ou explicites. Les implicites peuvent être
génétiques, épigénétiques,
culturelles. Les animaux savent naturellement construire leurs nid, s’occuper
des progénitures, chasser, se nourrir, vivre en groupe. Les connaissances
explicites sont formalisées et physiquement transférables.
La transmission et l’évolution des
interprétations et des connaissances
+
Les connaissances tout comme les interprétations relèvent de l’individu et/ou
de la société entière. Michel
Foucault (1926-1984) parle d’épistémè qui
est l’ensemble des connaissances scientifiques, du savoir d’une époque, ses
présupposés et ses interprétations. « L’épistémè
de la culture occidentale s’est trouvée modifiée dans ses dispositions
fondamentales ». (Michel Foucault, Les mots et les
choses)
+
Les connaissances sont acquises par une variété de processus cognitifs:
perception, apprentissage, raisonnement, mémoire, expérience, témoignage.
L'humanité a développé une diversité d’outils et de techniques destinées à
préserver, transmettre ou élaborer des connaissances, comme l’oralité,
l’écriture, l’imprimerie, l'école, les encyclopédies, la presse écrite, les
médias en général ou les ordinateurs.
+
Les connaissances ainsi que les interprétations se construisent à partir de
concepts linguistiques qui sont parfois des métaphores ou des métonymies. Exemple : champ gravitationnel,
anthropocène,
royaume de Dieu, justice, liberté, etc.
+ Le
monde compte aujourd’hui quelque huit millions de chercheurs de haut niveau
dans différentes spécialités. La coopération internationale dans l’échange des
connaissances est peu visible dans les médias, mais constitue probablement le
plus grand des trésors de notre époque. Ces chercheurs en 2012 ont publié 1,8
millions de documents soumis à des normes de rigueur scientifique vérifiées par
des comités de lecture indépendants.
+
Les bulles spéculatives néolibérales créées par les éditeurs scientifiques aux
dépends de la recherche constituent une menace pour la déontologie des
chercheurs, selon une tribune du Monde du 13/11/2013.
+
Selon Le Monde du 10/11/2013, une enquête de l’Institut Professionnel de la Fonction
Publique du Canada, la moitié des scientifiques au Canada ont été témoins de
censures de données ou d’ingérences politiques dans les travaux scientifiques.
Selon le philosophe Jacques
Bouveresse (né en 1940) : « La
science à ses débuts a été faite par des hommes qui étaient amoureux du monde,
mais elle finit par être essentiellement un instrument entre les mains de gens
qui ne rêvent que de dominer et à qui l’idée de découvrir la vérité à son sujet
est devenue à peu près indifférente. »
+ La
connaissance et l’interprétation sont sources de pouvoirs, scientifiques,
politiques, religieux, financiers. Ces pouvoirs prononcent des anathèmes.
+
L’histoire des sciences est marquée par ses trublions qui remettent en cause
les vérités établies. L’inquisition a brûlé vif Giordano Bruno
(1548-1600) pour avoir affirmé l’héliocentrisme. Les gardiens du temple
scientifique veillent aujourd’hui encore contre les dérives des pseudosciences
avec le risque de passer à côté de nouvelles perspectives. Yves Rocard
(1903-1992), physicien français père de l’ancien premier ministre Michel
Rocard, a vu son cursus scientifique, éminent par ailleurs, interrompu au
seuil de l’Académie des sciences à cause de son intérêt pour la radiesthésie et
le biomagnétisme.
L’immunologiste Jacques
Benveniste (1935-2004) a été évincé de l’INSERM en 1995 pour avoir publié
ses travaux sur la mémoire de l’eau.
Entre temps le biologiste et Prix Nobel de médecine en 2008 Luc
Montagnier (né en 1932) a estimé que Benveniste avait globalement raison.
Rupert Sheldrake (né en 1942), un auteur parapsychologue
anglais, ancien biochimiste, remet en cause les grands dogmes scientifiques
actuels tels que : La nature n’est que matière. Seul l’homme a une
conscience. Le cerveau produit la conscience et la contient. Nos gènes
expliquent toute notre hérédité. La quantité globale d’énergie et de matière ne
varie pas. Le paranormal n’existe pas. Sheldrake est devenu persona non grata de la communauté
scientifique.
+ Le
phénomène de dissonance
cognitive a été étudié par le psychosociologue américain Léon Festinger (1919-1989).
Celle-ci est caractérisée par le fait que « les
personnes dont les convictions sont contredites par les faits se convertissent
en prosélytes d’autant plus fervents que les faits sont devenus
irréfutables ». C’est le cas probablement aujourd’hui des climato-sceptiques
ou des créationnistes.
+
L’équilibre cognitif a contrario peut demander le droit à l’ignorance. « Je revendique le droit à
l’ignorance » dit le sémiologue Roland Barthes
(1915-1980).
Les frontières floues entre connaissance et
interprétation
+ « Ce qui est rationnel est réel. Ce qui
est réel est rationnel. » Hegel
(1770-1831).
+ « Il faut voir pour croire » cet
adage, déjà réfuté par l’Evangile, est aujourd’hui l’argument des
climatosceptiques qui considèrent que les signes et les calculs annonçant la
catastrophe climatiques à venir ne sont pas probants.
+
Inversement le principe de
précaution doit être interprété avec précaution car il peut servir à inhiber n’importe quelle action.
+
Les connaissances sont en général assorties des interprétations de leurs
auteurs. Les interprétations sont parfois marquées par des intérêts pas
nécessairement explicités par les auteurs. La recherche du bien-être intellectuel
ou matériel, la survie professionnelle (« Publier
ou périr »), voire la vanité peuvent être des raisons cachées des
logiques d’interprétation dogmatiques des connaissances. La transmission de
l’histoire nationale est celle de l’interprétation des faits historiques
soigneusement filtrés. (Les Romains auraient civilisé la Gaule tout comme les
Européens l’Afrique.)
+
Dans leur ouvrage « L’événement
anthropocène », les historiens Christophe Bonneuil
(né en 1968) et Jean-Baptiste
Fressoz, analysent l’ère géologique actuelle appelée anthropocène
correspondant à la transformation radicale de la planète par l’activité
technologique humaine depuis le 18è siècle (Journal Le Monde du 9/11/2013).
Leur interprétation est qu’il s’agit aussi d’un « thanatocène »,
porteur à la fois de vie et de mort. Ils notent que les grandes technologies
qui exploitent la nature au profit des humains sont historiquement marquées par
leur origine militaire et destinées initialement à tuer. Les pesticides sont
hérités des gaz de combat. Les engrais azotés sont liés aux explosifs.
La
surexploitation des océans par la pêche est possible grâce aux sonars, radars
et aux filets de nylon développés pour les militaires. L’aviation civile, la
marine, le nucléaire, l’Internet, le GPS, la chirurgie sont des retombées de
pratiques militaires. Les économies d’énergies et de moyens occupent une faible
place dans les logiques militaires. Les humains chosifient la nature à leur
discrétion tout comme ils ont tendance à chosifier leurs troupes et leurs
ennemis dans les guerres.
+
Disposons-nous toujours de tous les éléments nécessaires à une juste
interprétation de notre vécu quotidien ou de l’ère historique dans laquelle
nous sommes embarqués ?
+
L’individu adhère aux interprétations majoritaires du groupe auquel il se sent
appartenir. Il lit les journaux qui écrivent ce qu’il aime entendre.
+
Aujourd’hui plus que jamais, à cause de ou grâce aux médias, s’opère des
amalgames entre connaissances scientifiques et les interprétations
conjecturales ou orientées.
+
Les objets immatériels sont plus difficiles à définir donc sujet à
interprétation. Plus un objet est abstrait, plus il est sujet à interprétation.
+
Interprétation des textes: certains passages de textes sacrés sont
controversables. Le Psaume
137 de la Bible par exemple dit : « Babylone,
la belle, toi qui va être ravagée, heureux qui te paiera de retour pour le mal
que tu nous as fait ! Heureux qui saisira tes enfants et les écrasera
contre le roc ». Ce genre de texte mérite aujourd’hui une interprétation
non littérale. L’interprétation récurrente des textes débouche sur leur auto
justification, ce sont des ensembles auto-référents. Il en est parfois de même
des publications scientifiques ou pseudoscientifiques ou encore des œuvres
d’art. Des textes souvent cités et interprétés deviennent des dogmes.
L’autorité morale des auteurs ou des institutions joue un rôle important dans
le passage du statut de l’interprétation à celui de la connaissance.
+
Les mythologies, les contes sont polysémiques et interprétables de multiples
manières à travers l’espace et le temps. Les mythes d’Œdipe ou de la malédiction
des Atrides peuvent être vus
comme une illustration des grands tabous de l’humanité : le parricide,
l’infanticide, le cannibalisme, l’inceste, le suicide. On peut y voir
l’illustration de la folie humaine, de l’hybris (la démesure), de Némésis (la colère
des dieux), de la violence sous-jacente à la vie humaine (« tuer pour ne
pas être tué »), des boucs émissaires, du tragique de la vie, des ravages
des superstitions, du besoin de transcendance. La psychanalyse y puise des
modèles de structures de l’inconscient.
+ La
paranoïa est un délire d’interprétation. Le sujet est enfermé dans une bulle de
constructions mentales tressées dans la peur. « Les paranoïaques présentent dans leur attitude ce trait frappant et
généralement connu, qu'ils attachent la plus grande importance aux détails les
plus insignifiants, échappant généralement aux hommes normaux, qu'ils observent
dans la conduite des autres » selon la psychanalyse. Freud ajoute : « Sur ce point, le paranoïaque a donc, dans une certaine mesure, raison
: il voit quelque chose qui échappe à l'homme normal, sa vision est plus
pénétrante que celle de la pensée normale ». Certains paranoïaques sont
réellement persécutés ou cherchent à l’être...
+ La
surinterprétation des faits ou des paroles déclenche parfois des hystéries
collectives ou individuelles spontanées ou soigneusement dirigées à des fins
partisanes.
+
Rôle du langage. Le langage pour interpréter ou conférer le statut de connaissance
à la description d’un fait joue un rôle important. Un même fait peut être perçu
comme positif, négatif ou indiscutable selon les mots utilisés et leurs
connotations.
+
Les leaders d’opinions dans les sciences, les lettres, les arts, le
militantisme, les médias, élaborent et diffusent des modèles de connaissance
traduisant en fait leur interprétation. La controverse, l’intérêt caché ou les
conflits de chapelles constituent souvent le fonds de commerce des
protagonistes. Le niveau de diplôme ou la notoriété des protagonistes n’est pas
toujours une garantie d’objectivité. « S’ils (les magistrats) avaient la
véritable justice et si les médecins avaient le vrai art de guérir, ils
n’auraient que faire de bonnets carrés ». « L’imagination dispose de tout. Elle fait la beauté, la justice
et le bonheur qui est le tout du monde. » Pascal, Pensées, 82. La
légitimité du pouvoir est affaire d’interprétation.
+ Le
déluge de données informatiques dans tous les domaines comme les sciences, la
médecine, les sciences humaines, la vie privée des individus pose des problèmes
inédits. Pour accéder à des connaissances, il faut extraire, telles des têtes
d’épingles de bottes de paille par des logiciels complexes, les données
pertinentes et les interpréter. Un disque dur à 80 euros peut contenir autant
d’informations qu’une bibliothèque nationale. Le volume de données
informatiques double tous les 18 mois depuis l’origine de l’informatique. Les
systèmes d’espionnages sont censés protéger les citoyens contre la criminalité,
mais servent aussi à l’espionnage économique, à la manipulation de masse ou à
la traque des opposants politiques. A contrario, dans les démocraties, l’open
data, les données ouvertes, devrait permettre un meilleur contrôle des
gouvernants par les citoyens.
+
Les hoax sur Internet sont des
canulars informatiques reposant sur des interprétations volontairement erronées
de connaissances. La blogosphère est régulièrement inondée de fausses
informations s’appuyant sur l’argument
« on vous cache tout, je vais vous dire la vérité ». De bruyants
spécialistes du buzz alimentent
Internet de faux sondages ou agitent les réseaux sociaux avec des informations
biaisées, ou donnent du sens à de l’insignifiant. L’interprétation
conspirationniste des événements dans les théories du complot
fait particulièrement florès sur Internet. Il s’agit souvent de pseudoscience
(soucoupes volantes, ovni) ou d’activisme à bon ou mauvais escient (conflits
d’intérêts, espionnage, sociétés secrètes). «
Il y a plus faux que le faux, c'est le mélange du vrai et du faux. » Paul
Valéry
+ Le
biaisage des données statistiques fait partie des techniques d’apparence
scientifique de manipulation dans l’interprétation des faits. La corrélation de
deux faits n’implique pas nécessairement un lien de causalité direct. Des
co-facteurs impensés peuvent intervenir. On peut sélectionner les échantillons
de population jusqu’à ce qu’on trouve ce qu’on veut trouver. Enfin, les faibles
occurrences sont parfois les arbres qui cachent la forêt (ou l’écharde dans
l’œil de l’autre qui fait oublier la poutre dans le sien). Les crédits de
recherche sur les effets des faibles champs électromagnétiques sur la santé
publique, qui n’ont jamais rien montré de significatif, ont été longtemps
supérieurs à ceux contre la malaria qui tue des millions de gens dans le tiers
monde chaque année. Des gens se sont dits malades par la proximité d’une ligne
haute tension alors que celle-ci n’a jamais été en service. Des augmentations
des maladies de la thyroïde ont été attribuées aux retombées radioactives de
Tchernobyl dans des régions où de manière certaine elles n’ont pu avoir lieu.
+
Les victimes identifiables captent davantage l’attention des médias, du public
et des politiciens que les victimes statistiques. L’affaire Leonarda
occupe plus de place dans les médias que les milliers de pauvres ou de réfugiés
dans le monde. Selon Staline
« La mort d’un seul soldat russe est
une tragédie, un million de morts est une statistique ». L’allocation de
ressources publiques dépend souvent du tapage médiatique autour d’un problème
donné.
+ La
calomnie laisse toujours des traces.
+
Les sondages
d’opinions sont souvent biaisés, malgré leur apparence neutre et objective,
ils disent ce que le commanditaire souhaite.
+
Les agences de
com’ ont pour mission d’élaborer les messages et éléments de langage pour
faire passer les interprétations de leur commanditaires.
+
L’opinion publique est plus sensible aux argumentations des faiseurs de peur
qu’aux arguments plus complexes des scientifiques. La connaissance scientifique
n’est pas démocratique, elle ne se décrète pas, elle se révèle.
L’interprétation peut se décréter.
+ Le
vrai scientifique, c’est le cas de la plupart des chercheurs, est en principe
prudent et modeste dans ses interprétations ; ce qui est rarement le cas
des doctrinaires.
+ La
validité de l’interprétation ou de la connaissance en dernier ressort émane et
débouche sur la confiance : confiance dans l’autre, en soi, dans les
institutions, dans l’avenir. Cette confiance implique également des éthiques du
doute, du sens critique, de la coresponsabilité, de cohérence des paroles et
des actes, de l’honnêteté.
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Contribution de Catherine Delaunay, transcrite à partir de ses notes.
Interprète-t-on à défaut de connaître ?
1 .Le sujet porte sur la connaissance c'est-à-dire à
l’accès à la vérité objective et universellement admise notamment par les
sciences. Le sujet du débat se demande si cette connaissance objective est
possible ou bien si cette connaissance reste cantonnée à une interprétation,
c’est-à-dire à une élucidation seulement subjective. Donc le concept
d’interprétation peut avoir quelque chose de péjoratif, de négatif ; il serait
une moindre connaissance, une connaissance inférieure, une conception parfois
erronée, défectueuse, partielle, partiale, tronquée ou approximative.
2. Le
sujet peut porter sur l’interprétation d’une partie de la réalité ou sur la
totalité de la réalité. Sur une partie de la réalité, le concept
d’interprétation est déjà très ancien puisque Aristote en a parlé au 4e
siècle avant J-C. Ce concept connaît un regain d’intérêt à la fin du 19e
siècle et au début du 20e siècle avec l’avènement des sciences
humaines, à savoir de l’histoire, de la sociologie, de la psychologie, de la
psychanalyse, de la linguistique, de l’ethnologie, etc. Les sciences humaines,
comme leur nom l’indique, ont l’homme comme objet d’étude et d’interprétation,
à savoir les comportements humains, individuels ou collectifs, passés ou
présents. Par extension il s’agit de toutes les productions humaines, les
langues que l’on traduit, les œuvres d’art, une partition de musique, une pièce
de théâtre, un poème, etc. Les textes religieux sacrés ont besoin d’être
interprétés par des exégèses. Bref le champ de l’interprétation est vaste. Ici il
concerne exclusivement l’humain. Le présupposé sera que l’humain étant plus
complexe que la nature ou la matière, il n’est pas possible d’accéder à une
vérité objectivement comme cela est permis dans les sciences exactes ou
expérimentales. Là, l’objet extérieur à l’homme est parfaitement identifiable.
Mais
le sujet peut-être pris dans un deuxième sens et porter sur la totalité de
la réalité. Certains affirment que même les phénomènes et qui prétendent
être connus scientifiquement par la physique, la chimie, la biologie ou
l’astrophysique ne peuvent en réalité être atteints que par l’interprétation. Après
tout, les sciences les plus nobles ont une histoire. Des théories dites vraies
à une époque se sont avérées fausses un peu plus tard. N’est-ce pas la preuve
que dans tous les domaines, on interprète à défaut de connaître ? Je vous
propose un cheminement suivant sur mon exposé. A) Commencer par définir de
manière comparative la connaissance et l’interprétation. B) Examiner plus
particulièrement les critiques que l’on formule à l’égard de l’interprétation
dans le champ des sciences humaines. C) S’interroger sur la position qui
consiste à dire que toute connaissance même scientifique est déjà une
interprétation. D) Et enfin quelle portées, quelles conséquences si on doit se
contenter de l’interprétation ?
Analyse comparative des concepts de
connaissance et d’interprétation.
Connaissance
vient du verbe latin « cognoscere » qui veut dire savoir,
apprendre, étudier. «Cognoscere » est constitué à partir de « cum »
qui signifie « avec » et de « nascere » qui signifie « naître » ;
connaître, c’est naître avec, naître une
deuxième fois, émerger de l’ignorance, de l’illusion, de l’erreur pour s’élever
à la vérité, à la connaissance. Cette sorte de renaissance sera le thème
central de Platon dans le texte
célèbre de l’allégorie de la caverne dans la République.
Nous serions prisonniers de l’obscurité et de nos sensations, opinions,
préjugés, mais nous pourrions nous en libérer et pour accéder à la lumière de
la vérité. Comment connaît- on ? Comment accéder à la vérité ? Par
l’explication des phénomènes. Il s’agit de déchiffrer les liaisons constantes et
nécessaires entre des paramètres, des variables et en déduire des lois. On va
montrer les enchaînements des causes et des effets. Par exemple, la molécule
d’eau s’explique par la combinaison de deux atomes d’hydrogène et d’un atome
d’oxygène. Par exemple, le mouvement des astres et des planètes s’explique par
la gravitation c'est-à-dire par le fait que les planètes s’attirent en fonction
du produit de la masse et inversement proportionnellement au carré de leur
distance. Selon les domaines et selon les objets à connaître, on procède par
démonstration, par expérimentation et par vérification.
Interprétation
vient du latin « interpretare », dérivé de
« interpres » c’est-à-dire intermédiaire. L’intermédiaire peut
désigner l’interprète. L’intermédiaire peut être le miroir fidèle de la réalité
mais il peut être aussi un écran qui fait obstacle et déforme la réalité.
Au
15e siècle et existait un substantif « l’interprétant »
c’était le devin qui énonçait soit ce qui était caché soit ce qui allait
arriver, l’avenir qu’il prédisait. Les synonymes d’interpréter sont décoder, déchiffrer,
décrypter, dévoiler. Interpréter c’est dire quelque chose sur quelque chose
selon Aristote ou Paul
Ricoeur ; mais c’est paradoxalement dire autre chose et dire en même
temps la même chose. L’interprétation juste est dans cet interstice entre le
dire autre chose et dire la même chose. C’est là la difficulté de
l’interprétation exacte.
Comment
interprète –t-on ? Tandis que la connaissance relève de l’explication,
l’interprétation relève de la compréhension. Expliquer et comprendre sont la
plupart du temps identiques ou équivalents dans le langage courant. Comprendre
c’est saisir du sens intuitivement de manière globale, c’est englober,
embrasser une signification. Alors qu’expliquer, c’est déployer un enchainement
de causes et d’effets, un enchaînement de propositions. Comprendre, c’est
pénétrer le sens parfois visible ou parfois invisible, le sens caché ou refoulé
d’un discours, d’un comportement, d’un rêve, d’un mythe, d’un événement, d’une
œuvre d’art. Paul Ricoeur dans un de ses premiers livres « Le conflit des
interprétations » dit: « L’interprétation
est le travail qui consiste à déchiffrer le sens caché dans le sens apparent, à
déployer des niveaux de signification impliqués dans la signification littérale ».
Il peut y avoir du sens caché, des sens cachés et des sens multiples. C’est
toujours du sens ou des sens que l’interprétation met en évidence.
On
parle de l’art de l’interprétation et non de la science de l’interprétation.
L’interprétation c’est plus un savoir-faire où entre une certaine habilité, une
certaine adresse, ingéniosité ou finesse. Alors que la science est une
discipline plus codifiée où il faut d’abord appliquer des règles de la logique
et un protocole expérimental. Evidemment plus interviennent l’intuition et l’esprit
de finesse, plus interfère un « coefficient de subjectivité ». Est-ce
que l’on découvre des sens déjà là ou bien est-ce qu’on invente un ou des sens nouveaux ? Qu’est-ce qui permet de savoir
qu’on ne se trompe pas, que le sens trouvé est bien le bon ? C’est le
problème de l’objectivité de l’interprétation qui se pose toujours. Quand
a-t-on fini d’interpréter ? L’interrogation n’est-ce pas un travail sans
fin ? Est-ce que l’interprétation n’est pas toujours en plus ou moins
arbitraire, subjective, relative à celui qu’il énonce ? Est-ce que
l’interprétation ne dépend pas de nos goûts, opinions, voire de nos
préjugés ?
Le
second point à aborder est : « quelles
critiques à l’égard de l’interprétation ? » Plutôt que de recenser
ses objections, je partirai d’exemples qui illustrent les difficultés de
l’interprétation.
Le
champ de l’histoire. Spontanément nous croyons que le travail de
l’historien est facile. Il suffirait de restituer, de ressusciter le passé en
quelque sorte, en rassemblant des documents, des archives, des vestiges, des
témoignages pour mettre à jour la compréhension d’un événement ou d’une période
et aboutir à une seule interprétation. En réalité c’est faux ; l’histoire
elle-même selon les époques s’est référée à des schémas d’interprétation
différents. Par exemple, pendant des siècles on a privilégié l’histoire
militaire, diplomatique ou politique. Le rôle central était dévolu aux
gouvernements, aux monarques, au corps d’Etat, aux armées, aux institutions et
on ignorait ce que vivaient les peuples. Puis à partir du 19e siècle,
sous l’influence du marxisme
notamment, c’est l’histoire économique et sociale, l’histoire des masses, qui
est devenue prépondérante, et on a adopté une seule grille d’interprétation, à
savoir interpréter les événements politiques à partir des causes économiques. Raymond Aron dans son
introduction à la philosophie de l’histoire a montré que l’historien est condamné
à accepter différentes interprétations possibles d’un événement. L’histoire
elle-même évolue dans ses interprétations. Un bon exemple est celui de la
révolution française. Pendant longtemps les historiens ont considéré que
l’acteur principal de la révolution
française était le peuple, le petit peuple, qui s’est révolté contre la
monarchie absolue, contre l’oppression, contre les taxes et les impôts. Puis
l’interprétation marxiste au 19e siècle s’était imposée, à savoir
que c’est la bourgeoisie qui a conduit et a encouragé ces bouleversements
contre la noblesse et en a tiré profit. Aujourd’hui cette interprétation est
insuffisante et les historiens prennent soin de distinguer différentes phases
de la révolution française. Les rôles de la bourgeoisie, de la noblesse, du
clergé ou du petit peuple ont pu varier selon les périodes à savoir avant et
après1793, année de la Terreur.
De manière générale Raymond Aron réfute l’idée que l’on pourrait appliquer à
tous les événements un seul schéma unitaire d’interprétation où ce serait
toujours des causes économiques et sociales qui en dernière instance
expliqueraient les événements. Même si c’est parfois vrai, ce ne l’est pas
nécessairement dans tous les cas.
Georges Duby, historien du
20e siècle, rejoint Raymond Aron en expliquant que chaque époque
recrée son histoire, la réinterprète avec de nouveaux questionnements, de
nouvelles valeurs, de nouvelles représentations. Par exemple, dans la période
d’après-guerre, on a admis que des fonctionnaires qui avaient servi sous le
gouvernement de Pétain continuent
à exercer des fonctions. Et puis 50 ans plus tard, on a fait des procès à Papon, Bousquet ou Touvier parce que les
époques nouvelles imposaient de nouvelles exigences, de nouvelles normes.
Georges Duby s’exprime ainsi : « tout
discours sur le passé est l’œuvre d’un homme qui vit dans un présent et qui
interprète les vestiges du passé en fonction de ce présent. » On voit
que l’interprétation n’est pas totalement arbitraire mais elle évolue et change.
Le
champ de la psychanalyse. La psychanalyse interprète des symptômes, le
pathologiques, des rêves, des actes manqués. C’est encore plus difficile de
parvenir à des interprétations dites objectives et qui feraient l’unanimité.
Par exemple Sigmund Freud
était convaincu que toutes les névroses s’expliquent en dernière instance par
un conflit d’ordre sexuel. Mais certains de ses disciples comme Jung ou Adler n’étaient pas du
même avis. Freud était convaincu que tous les rêves étaient
l’expression et la réalisation d’un désir plus ou moins conscient, masqué ou refoulé.
Aujourd’hui des chercheurs comme Michel Jouvet proposent
d’autres interprétations. Pendant le sommeil, le cerveau connaîtrait une
intense activité nerveuse qui permettrait chaque nuit de se reprogrammer et de
consolider la personnalité génétique et psychologique. Freud a tenté d’élaborer,
disait-il, une science de l’interprétation du rêve. Il a élaboré une méthode
d’analyse du rêve à partir de concepts. Il a montré que tous les rêves
travaillent toujours de la même manière à partir des mécanismes que sont la
condensation, le déplacement et la symbolisation. La condensation concentre
plusieurs chaînes de souvenirs, désir, pensées sous une image composite. Le
déplacement est un procédé qui masque l’essentiel du désir en le projetant sur
un élément qui paraît insignifiant. La symbolisation dans le rêve est une suite
de symboles culturels ou personnels pouvant signifier et cacher en même temps
les désirs.
Les
textes littéraires ou sacrés et les œuvres artistiques. L’arbitraire
y est encore davantage patent. Est-ce que la seule interprétation valable est
celle qui était attestée par l’écrivain et ses intentions
conscientes ?
Pour
les textes sacrés il est évident que l’interprétation est différente selon que
l’on est croyant ou athée. Il y a des interprétations réductrices et
destructrices qui ne verront que superstition là où des croyants verront une
sur abondance de significations.
Et si toute connaissance même la plus
scientifique n’était interprétation ? Le sens commun croit que les
scientifiques accèdent directement et immédiatement à la connaissance des
phénomènes de la nature. Bachelard
faisait remarquer qu’il faut être déjà savant pour observer ce qui est
significatif. Les sciences ont trébuché souvent. Par exemple, on s’est
longtemps demandé comment expliquer les phénomènes de combustion. Les alchimistes s’évertuaient à
décrire les flammes, leur couleur, les grésillements des bûches, etc. Tout cela
était sans intérêt. Il faudra attendre Lavoisier pour mettre
en évidence que toute combustion est une oxygénation, une combinaison avec
l’oxygène. La science a bredouillé et elle a balbutié. Les théories et se sont
succédées et se sont remplacées les unes les autres. Par exemple la théorie de
l’atome depuis Démocrite.
La théorie de la
lumière ; Descartes
la croyait instantanée, Newton
en a formulé une théorie corpusculaire, Fresnel , Huygens, Maxwell une théorie
ondulatoire. Louis de Broglie
a associé les deux représentations corpusculaires et ondulatoires.
Les
sciences construisent leur objet à travers des concepts forgés par l’esprit
humain, par exemple le concept de masse, d’intensité, d’électricité, de gènes,
de tissus, de cellules d’hérédité etc. Ces concepts dépendent de théories et
d’un certain état de la science. La science dépend de l’environnement social et
économique politique et idéologique par exemple l’affaire Lyssenko en URSS. Les pouvoirs
politiques, économiques, industriels, techniques font pression sur la science.
Il n’existe peut-être plus de recherche gratuite et désintéressée à des seules
fins de vérité. Si toutes les recherches appliquées se réalisent à des fins d’efficacité
d’intérêts, la vérité existe-t-elle vraiment ? Donc il faut se méfier de
la vision angélique et idyllique de la connaissance et de la science. Il vaut
mieux accepter l’idée que même la science n’est qu’interprétation. Cela nous
rend vigilant quant à son contenu idéologique.
Conclusion.
Sur
le plan de la vie quotidienne. C’est très positif de savoir que nous ne
percevons jamais les choses ou les autres tels qu’ils sont, alors que la
plupart du temps nous sommes persuadés de percevoir les choses et les autres
tels qu’ils sont. Notre perception ordinaire n’est qu’une approximation et
comporte beaucoup d’a priori, de préjugés et d’erreurs. Etre conscient que ce
que nous ne faisons qu’interpréter me semble très positif.
Sur
le plan des sciences humaines. Il me semble important d’être vigilant et
d’oser contester certaines interprétations qui se présentent définitives et
dogmatiques. Il faut se méfier des interprétations autoritaires, trop rigides,
trop sûres d’elles comme a pu être l’interprétation marxiste en son temps. Il
faut aussi se méfier des excès d’interprétation qui partent dans tous les sens.
Il existe en psychanalyse une pathologie appelée délire d’interprétation, la
paranoïa, où le sujet voit partout des signes qu’il est persécuté. En même
temps pouvoir interpréter apporte richesse et supplément de sens. Dans une
pièce de théâtre ou dans un concert les spectateurs peuvent voir et entendre
des choses que peut-être le metteur en scène, les comédiens, les musiciens n’avaient
pas perçues et cela enrichit l’œuvre.
A
l’égard des sciences exactes. Là aussi la vigilance est nécessaire. La
science d’aujourd’hui est tellement déterminée par un environnement social, économique,
industriel, technologique, politique et idéologique qu’on ne peut plus croire
qu’elle soit totalement désintéressée et assujettie à la seule exigence de
vérité. Elle sert aussi des intérêts, elle cherche l’efficacité au service de
toute sorte de pouvoirs en place.
oooooooooooooooooooooooooooooo
Propos entendus
+ L’interprétation
met du sens plutôt que de la vérité.
+ L’informatique
transcode. L’informaticien interprète.
+ L’intelligence
des choses, c’est leur connaissance et leur interprétation.
+ Il
y a opposition entre les sciences exactes et les sciences humaines.
+ Les
sciences n’atteignent jamais les causes ultimes.
+ Je
comprends l’homme, j’explique la nature.
+ La
matière et l’énergie sont des concepts le paradoxaux. L’énergie se prête à
l’interprétation, la matière relève de la connaissance.
+
Tout est interprétation. L’interprétation et la connaissance dépendent du
référentiel. Interpréter sert à trouver du sens à partir d’un point de départ
vers un objectif.
+ Tout
acte de penser est un acte de libération, de maîtrise de son destin. Le but de
la science est de faire face à l’inquiétude de l’homme. Chaque homme a le droit
de penser et de connaître. Il y aura toujours une tension entre la pensée
individuelle et la pensée collective.
+ On
ne connaît jamais tour d’une personne ou d’une chose. On interprète à partir de
ce que l’on sait.
+ Une
œuvre musicale est composée à partir de sept notes que l’on peut interpréter à
l’infini.
+ Toutes
les interprétations sont différentes, ce qui constitue un enrichissement du
sens.
+ L’œuvre
a une valeur intrinsèque, mais les interprétations sont multiples.
+ Les
interprétations des grandes œuvres classiques sont devenues connaissance. C’est
la dernière interprétation qui a force de valeur.
+ La
connaissance a changé à partir de 1905 par l’émergence de nouveaux paradigmes comme
la psychanalyse, le marxisme, les théories de la relativité. Le progrès vient
de l’interprétation.
+ Il
y a le sujet qui interprète et l’objet interprété. Il s’agit de phénomènes
naturels ou de comportements humains. On n’arrêtera jamais de rechercher la
connaissance et la vérité des choses. La vérité varie avec le temps et le
domaine.
+ Les
sciences exactes sont plus crédibles que les sciences humaines.
+ Pour
connaître l’autre il faut l’aimer. La connaissance est liée à la relation
humaine.
La perception
de la vérité d’une démonstration dépend de l’état d’empathie entre le professeur
et l’élève.
+ Tout
est interprétation.
+ Il
est important qu’il y ait des interprétations multiples dans les sciences dites
exactes et dans les sciences humaines.
+ Il
est heureux que l’interprétation de l’homme soit prépondérante dans la
connaissance.
+ L’ultime
connaissance est celle de la mort.
+ L’homme
et l’acteur et l’interprète de sa propre vie.
+ Les
pédagogues se querellent depuis toujours sur la question de la juste transmission
des connaissances.
+ L’interprétation
est indispensable à la connaissance.
+ Dans
la vie quotidienne, les réactions, souvent problématiques, des personnes,
parfois problématiques, dépendent de leur interprétation des choses en positif
ou en négatif.
+ Connaître
est un accompagnement.
+ Le
manquent de connaissances appelle l’interprétation.
+ Les
mathématiques ne sont pas un sujet d’interprétation. Elles sont indépendantes
des faits. C’est une construction de la raison humaine. Les mathématiques
construisent sans cesse des objets nouveaux.
+ L’interprétation
permet de faire grandir.
+ L’interprétation
est complexe et simple à la fois. Tu vois une chose , tu en montres une autre,
et celui qui regarde en voit encore une autre.
+ Nous
sommes soumis sans cesse à des maîtres à penser qui apportent des
interprétations toutes faites.
+ L’acquisition
de connaissances se fait à partir de l’interprétation du passé.
+ Interpréter
me rassure.
+ L’interprétation
a sans cesse besoin de nouvelles connaissances.
+ Connaîtra-t-on
un jour à la vérité ?
+ Les
médias nous envoient sans cesse leur vérité.
+ Il
faut mutualiser les connaissances pour interpréter.
+ La
lumière se comprend à partir de la nuit.
+ L’origine
de la vie est la connaissance. Le développement du cerveau du bébé se fait à
partir de l’acquisition de connaissances et d’interprétation de ces
connaissances. Connaissance interprétation vont ensemble dans le cerveau.
+ La
vérité sort de la bouche des enfants, dit-on.
+ Pour
accéder à la connaissance il ne faut pas trop interpréter. L’interprétation est
souvent une hypothèse mal formulée. Il faut cependant rester humble devant les faits.
+ La
musique est mathématique. Les bons matheux sont de bons musiciens.
+ Nous
ne percevons jamais les gens et les choses tels qu’ils sont. Il faut se méfier
des interprétations dogmatiques aussi bien dans les sciences dites exactes ou les
sciences dites humaines. Il faut se méfier des interprétations trop sûres
d’elles-mêmes.
+ La
paranoïa est un délire d’interprétation. Il faut avoir des doutes sur ses
connaissances.
+ Les
interprétations s’enrichissent mutuellement.
+
L’interprétation est un métalangage c'est-à-dire un commentaire sur la
connaissance elle-même. L’homme sait qu’il sait.
oooooooooooooooooooooooooooooo
Citations
« Il
n'y a pas de délire d'interprétation puisque toute interprétation est un
délire. »
Clément
Rosset
« Le
silence est l'interprète le plus éloquent de la joie. »
William
Shakespeare
«
Lire, c'est toujours interpréter. »
Henry
Miller
«
Interpréter, c’est appauvrir, diminuer l’image du monde, lui substituer un
monde factice de “significations”. »
Susan
Sontag
«
Les philosophes n'ont fait qu'interpréter diversement le monde, il s'agit
maintenant de le transformer. »
Karl
Marx
« Que
toute loi soit claire, uniforme et précise : l'interpréter, c'est presque
toujours la corrompre. »
Voltaire
«
Nous habitons un monde interprété par d'autres où il nous faut prendre place. »
Boris
Cyrulnik
«
L'interprétation n'a pas plus à être vraie que fausse ; elle a à être juste. »
Jacques
Lacan
«
Les yeux sont les interprètes du cœur, mais il n'y a que celui qui y a intérêt
qui entend leur langage. »
Blaise
Pascal
« Si
au lieu d'interpréter les faits, on se contentait d'en tenir compte, tout irait
moins mal dans les familles et les états. »
Jean-Louis
Gagnon
Toutes
choses sont sujettes à interprétation ; quelle que soit l’interprétation
dominante à une certaine époque, elle émane d’un rapport de force et non de la vérité.
Friedrich
Nietzsche
L’interprétation
des rêves est la voie royale de la connaissance des activités inconscientes de
l’esprit.
Sigmund
Freud
Le
principal objet d’une révolution est la libération de l’homme ... et non pas l’interprétation
et la mise en œuvre de quelque idéologie trancendante.
Jean
Genet
« Ne
cherche pas à savoir toute chose, de peur de tomber dans l’ignorance totale. »
Démocrite
(460-370)
« Au
fond, on ne sait que lorsqu’on sait peu : avec le savoir croît le doute. »
Wolfgang
Goethe (1749-1832)
«
Celui qui aime à apprendre est bien près du savoir. »
Confucius
(555-479)
« La
connaissance est pour l’humanité un magnifique moyen de s’anéantir elle-même. »
Friedrich
Nietzsche (1844-1900)
« L’information
n’est pas la connaissance. »
Albert
Einstein
« Chacun
peut acquérir toutes mes connaissances. Mais mon cœur m’appartient à moi seul. »
Johann
Wolfgang von Goethe
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Réflexion sur la mort
d’Arlette Coutin
Novembre 2013
A l'heure de l'ultime connaissance
L'homme sera en évidence
Du devenir de son sort
Derrière le rideau de la mort
Au chuchotement qu'on entend
Grondant dans les derniers moments.
Elle entre dans toute maison
Elle frappe à toute saison
Elle emporte tous les hommes
Dans son lit pour un dernier somme
Où l'on ne peut dire où il mène
Seulement qu'aucun n'en revienne
Derrière cette séparation
Elle laisse des interprétations
Danser autour de ce mystère
De la vie après la matière
N'y-a-t-il rien après la mort
Revient-on dans un autre corps
Est-on jugé au purgatoire
En attente dans un long couloir
Le Paradis existe-t-il ?
Ou le noir de l'enfer hostile
Autant de représentations
Nourrissent notre imagination.
L'homme trouvera sa vérité
Qui lui permettra d'accéder
A un chemin de connaissance
Pour qu'il donne à sa vie un sens
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