Qui sommes-nous ?

PRESENTATION

L’association du Chemin du philosophe comporte trois types d’activités :

1)  L’entretien et l’animation du Chemin du philosophe en forêt de Montmorency.

2)  L’organisation de cafés philos, de conférences, d’ateliers de lecture, de sorties à thèmes en forêt.

3)  La maintenance de ce blog qui tient à jour le programme des activités et qui les archive depuis 2008.

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Station "L'homme et le cosmos"

Station "L'homme et le cosmos"
Cadran solaire analemmatique - juin 2014

Programme

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samedi 29 octobre 2011

Café philo du 28 octobre 2011 -compte rendu




" Peut-on avoir raison contre les faits ? " 
Nous étions vingt-six ce vendredi 28 octobre 2011 au café « Le Biouti » de Montlignon pour débattre du sujet de bac 2011 : « Peut-on avoir raison contre les faits ? ». Ce sujet concerne la connaissance de la réalité. 


 Nous fêtons cette semaine le bicentenaire de la naissance d’Evariste Galois. Évariste Galois (né à Bourg-la-Reine le 25 octobre 1811 – mort à vingt ans suite à un duel à Paris, le 31 mai 1832) est un mathématicien français qui a fait la découverte, « peut-être la plus grande qui ait jamais été faite dans le domaine de l'algèbre ». Alors que les mathématiciens depuis 25 siècles cherchaient des méthodes de résolution d’équations, Galois a mis au point une théorie qui permet de déterminer si une équation algébrique quelconque a des solutions intrinsèques ou pas. Il a raté par deux fois le concours d’entrée à Polytechnique, ses communications scientifiques ont été refusées par d’illustres mathématiciens de l’époque dont Poisson et Cauchy. Ce n’est qu’en 1843, onze ans après sa mort que Joseph Liouville présenta les travaux de Galois à l’Académie des sciences. Ses théories servent aujourd’hui dans le domaine de la conception numérique des objets industriels et de la cryptographie. A noter également que Galois passa plusieurs semaines en prison à Sainte Pélagie, comme prisonnier politique opposé au roi Louis-Philippe. Son destin, comme celui d’autres penseurs qui avaient « raison trop tôt », pourrait servir d’illustration à notre thème « Peut-on avoir raison contre les faits ? » 
« Il est dangereux d’avoir raison dans des choses où des hommes accrédités ont tort. » Voltaire.

On peut s’interroger comment un fait peut être contesté par la raison, alors que le fait devrait s’imposer spontanément. Le fait contient sa propre vérité, il peut cependant faire l’objet de débat. 
On considère différents types de faits :
- Les faits empiriques du quotidien, qui ne devraient pas faire débats. Et pourtant dire que le soleil se lève et se couche constitue une fausse interprétation de l’observation immédiate. Les épicycles de Ptolémée qui ajoutaient des cercles autour des cercles pour expliquer les mouvements des astres autour de la terre censée être fixe, constituaient une explication fausse mais rassurante.
- Les faits naturels ne sont pas discutables : inondations, orages, etc.
- Les faits historiques (règnes, guerres, etc.) ont existé mais leur interprétation est sujette à discussion.
- Les faits scientifiques. Les théories scientifiques sont vraies à un certain stade de la connaissance et tant que de nouvelles observations ne les remettent pas en cause. Les technologies qui fonctionnent indiquent que les théories, dont elles sont issues, sont justes, même si celles-ci sont partielles. 
Les faits empiriques, tout comme les faits historiques font toujours l’objet d’interprétations. L’esclavage peut être interprété comme dû à l’absence de machines et/ou comme dû à une certaine conception de l’ordre social et humain. Un fait historique est sans cesse réinterprété par le futur. L’avenir fournit les clés du passé. L’histoire est écrite par les vainqueurs. « Les faits sont faits », disait le philosophe Alain (1868-1951). Avoir raison est un fait subjectif, qui peut être contraire à la raison. 
Contre les faits, l’histoire a connu les raison de visionnaires (hommes politiques, résistants, poètes, artistes, philosophes). Avec son « Dieu est mort », Nietzsche (1844-1900) annonce le déclin des religions. Kant (1724-1804) a développé les idées de paix perpétuelle, gouvernance mondiale. 
Les faits ayant leur propre raison. L’œuvre d’art est un fait, ses interprétations, ses intentions relèvent de multiples raisons possibles, notamment la beauté. L’ordre du droit n’est pas celui des faits. Dans le procès, la raison des uns s'oppose aux faits des autres. La raison peut aussi servir des intérêts particuliers et mise en forme dans les messages élaborés par la com des lobbies industriels, politiques, idéologiques.  
Les raisons et le doute. Certains faits peuvent être avérés sans que la science ne puisse toujours les expliquer (science du vivant, émergence de la conscience dans le cerveau, expansion de l’univers, supraconductivité, radiesthésie). Les religions officielles canalisent les extravagances sectaires, comme la médecine académique canalise le charlatanisme, tout en n’étant pas totalement exemptes des maux qu’elles normalisent ainsi. Pour avoir raison, il est nécessaire, mais pas suffisant, d'avoir la caution de la majorité. 
Les bases de la raison : Il existe différents degrés de raisons selon les faits : - Logique binaire : les faits sont objectivement vrais ou faux, le tiers est exclu (théorèmes mathématiques, une technologie fonctionne ou ne fonctionne pas, un être est mort ou vivant). - Syllogisme : tous hommes sont mortels, donc Socrate est mortel. (Si A donne B et B donne C alors A donne C). 
- Cette vérité objective binaire fonctionne dans un environnement donné à une certaine échelle d’observation, de temps, de taille, de connaissance. Au-delà du domaine la représentation de cette vérité peut être indécidable ou fausse : Notre représentation classique du monde ne fonctionne plus au niveau des atomes. Les logiques du local et du global, de l’individuel et du collectif, du cours et du long terme sont différentes. Des propriétés émergentes apparaissent lors du changement de taille. Le tout est plus que la somme des parties.  
- La démarche scientifique. L’étude de régularités dans la nature est la base de la science. Les quatre principes des sciences sont : universalité (valables partout), absolu, (indépendant de l’observateur), éternels (indépendant du temps), omnipotence (rien n’y échappe). Mais elles n’expliquent pas tout. Des règles particulières président aux différentes formes du vivant ou des systèmes écologiques ou sociaux. - L’illumination scientifique est un accès soudain au monde des idées, qui existe en dehors de l’homme selon Platon. Les mondes de la matière, celui des idées, celui des modèles générés par le cerveau humain semblent posséder des liens profonds. 
- Dans les systèmes complexes, à cause des rétroactions, les lois de causalités changent. L’évolution d’un système complexe est par essence imprédictible à long terme. Exemples : les phénomènes météorologiques, l’évolution des espèces, le système solaire ne sera pas indéfiniment stable, l’histoire des peuples peut être bouleversée par de petits événements.
- Intervention du hasard. La nature, l’histoire humaine évoluent avec une grande part de hasard. Le hasard est une stratégie de l’évolution pour explorer les combinaisons de gènes, de molécules ou de faits les plus aptes à perdurer. 
- Les raisons de l’irrationnel sont des faits même s’ils ne sont pas scientifiquement rationnels : l’art, les religions, les pseudo- ou demi-sciences, les superstitions. Même si les ovnis n’existaient pas, c’est un fait que certains y croient. Idem pour les dieux. Ces croyances s’appuyant sur des récits structurent le monde. Les constellations d’étoiles sont des constructions de l’esprit humain.
- Les controverses. Bruno Latour, né en 1947, est sociologue et philosophe des sciences, actuellement directeur scientifique à Sciences–Po Paris, il a étudié la construction sociale des faits scientifiques. Un certain nombre de sujets sensibles tels que la diminution des stocks de poissons, la mortalité des abeilles, les OGM, les ondes électromagnétiques, le bisphénol A, le changement climatique, la vaccination, l’éthique médicale, etc. donnent lieu à des controverses. L’opinion publique doute des experts et la masse des informations numériques disponibles sur un sujet donné est loin d’être fiable. Les positions sociales font partie intégrante du fait scientifique pour lequel Latour propose une objectivité de second rang qui tient compte de l’environnement social. Il coordonne un projet européen Macospol qui est l’acronyme anglais pour Cartographie des controverses scientifiques pour la politique. La méthodologie s’appuie sur le « data mining », la fouille profonde et l’analyse des données sur internet. Il s’agit de mettre en balance les arguments scientifiques, de mettre en évidence les conflits d’intérêts, les liens entre les types de controverses, les réseaux d’appartenance des acteurs, les porteurs de positions, les leaders, les lobbies. C’est un outil service de la politique qui devrait permettre de savoir où placer la confiance et faciliter les prises de décision sur des sujets complexes et controversés. Il est assez probable qu’un tel instrument assez coûteux soit détourné au service des puissants pour affiner leurs stratégies. Puisque les faits sont autant sujets à débat et qu'on peut avoir tort ou raison le dernier mot doit appartenir à un collège extérieur.
- La quantification. L’évaluation quantitative des faits peut servir à en objectiver la réalité, alors que l’évaluation qualitative relève davantage de la subjectivité. L’opinion publique en général semble faire preuve d’anumérisme, l’illettrisme numérique. Deux notions mathématiques essentielles semblent échapper à l’opinion publique, celle d’ordre de grandeur et celle de probabilité.  
- Les limites de la quantification. Mais vouloir tout quantifier comporte également des inconvénients, voire des dérives dangereuses pour les individus et la société : politique du chiffre, rendement des capitaux entrainant les délocalisations et le chômage, déshumanisation de la médecine, de l’école et des services publics, fracture sociale, etc. Tout système a besoin pour fonctionner de marges de manœuvre, de jeu mécanique, parfois inquantifiables. L’homme a besoin de liberté et cette liberté doit permettre une part d’imprévisible. 
- Le rôle du langage pour la légitimation d’une raison. Les langages et leurs codes spécifiques (jargons) tiennent lieu parfois de raison en sciences, en politique, en idéologie, en religions, dans les milieux professionnels. En 1996, Alan Sokal, de l’université de New-York, a monté un canular en réussissant à publier dans une revue prestigieuse « Social text » l’article plein de non-sens intitulé : « Transgresser les frontières : vers une herméneutique transformative de la gravité quantique ». Il voulait par là dénoncer une certaine mode des sciences humaines, notamment des dits postmodernes, de faire appel à des concepts des sciences dures pour se draper de scientificité. Les idéologies ont le plus souvent raison contre les faits. Elles traversent parfois l’Histoire en laissant beaucoup de décombres derrières elles. 
- Les bulles sont des ensembles très refermés sur eux-mêmes fonctionnant selon des logiques internes propres et dominantes. Il peut s’agir d’individus, de groupes sociaux, professionnels, clans, de systèmes idéologiques, de gouvernements (voir le film « L’exercice de l’Etat »), de bulles financières. Ils sont auto-référents et narcissiques. Ils développent leur propre langage. Souvent l’essentiel de leur énergie sert à leur fonctionnement interne, ce qui les amène à être tantôt prédateurs, tantôt autodestructeurs. Que l’on soit à l’intérieur ou à l’extérieur de telles bulles, il est difficile voire impossible d’avoir raison contre leur raison. Il faut souvent attendre qu’elles éclatent spontanément.  
- Les mouvements de fond de l’histoire. Peut-on, devrait-on avoir raison contre la mondialisation, les migrations de populations, Internet, les mouvements vers la démocratie, la laïcisation des sociétés, la technologie ? 

Propos entendus et notés : 
- Il n’y a pas de faits, mais que des interprétations. 
- Selon Guillaume d’Okham (1285-1347), « Il ne faut pas multiplier les explications et les causes sans qu'on en ait une stricte nécessité. » (Entia non sunt multiplicanda praeter necessitatem). 
- Le fait est signe du passage du passif à l’actif. 
- Une opinion est un fait.
- Une idée fausse est un fait vrai.
- Le fait est neutre. 
- L’essentiel de ce que nous savons vient d’ailleurs. Un fait est une narration. 
- Karl Popper (1902-1994) a inventé la réfutabilité comme critère de discrimination entre la science et la pseudoscience. 
- La mécanique quantique semble déraisonnable. 
- La réalité existe-t-elle en dehors de notre imagination ? 
- La science, l’art, les idéologies ont besoin d’hérétiques.
- En médecine on redécouvre des remèdes ancestraux. 
- La vérité, c’est ce qui marche. 
- Le darwinisme est contesté. 
- La science est une quête sans fin. 
- On ne comprendrait pas un monde chaotique. 
- Il est extraordinaire que le monde soit compréhensible. 
- L’art n’est pas universel. Il n’est pas de l’ordre de la raison. C’est un langage.
- L’artiste rejoint le scientifique par l’intuition. 
- L’art peut enfermer ou libérer. 
- La raison n’a rien à voir avec la morale. 
- Nous sommes prisonniers de notre modèle occidental. Il faut penser la fin de ce modèle.
- Il faut sortir de nos modes de penser.
- Les faits permettent de construire la représentation du monde. 
- Le spectre d’interprétation des faits est très large. Il va au-delà de la raison.
- On n’a pas parlé de Faurisson... 
- Face aux faits, il faut être humble, mais pas nécessairement soumis. 
- Le temps vérifie les faits. 
- Les faits et leurs représentations sont subjectifs.
- Notre subjectivité reconstruit les faits. 
- Malgré la raison, le monde reste barbare. 
- Dans le domaine de la justice, il y a le juge des faits et le juge du droit (cour de cassation). 
- Les faits et la raison évoluent. Ils dépendent du lieu et du temps. 
- Il faut plus que la raison pour interpréter les faits. 
- La controverse de Valladolid est un exemple de raison contre les faits. 
- Quand on a raison trop tôt, on a tort longtemps. 
- Les faits sont interprétés en permanence. 
- L’essentiel de notre existence se passe en dehors de la raison. 
- Les injonctions contradictoires aboutissent à des raisons du moindre mal. 
- L’optimum local n’est pas l’optimum global. 

Citations : 
Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point. Blaise Pascal 
Deux excès : exclure la raison, n'admettre que la raison. Blaise Pascal 
La raison se perd par le raisonnement. 

Recommandation :  
LA CONTROVERSE DE VALLADOLID De Jean-Claude Carrière - par la Cie Hubert Jappelle 18 novembre au 11 décembre 2011 Mardi, vendredi et samedi - 21h, dimanche - 16h Au Théâtre de l'Usine / Éragny-sur-Oise  www.theatredelusine.net

lundi 17 octobre 2011

LUD'AUTISME 95 - Exposition des 29 et 30 octobre 2011


L'association LUD'AUTISME 95, créée par notre ami Patrick Liautaud, qui regroupe des parents d'enfants autistes, travaillant autour d'une méthode de stimulation basée sur le jeu et œuvrant pour leur reconnaissance sociale, nous invite à l'exposition vente de jouets de collection les 29 et 30 octobre à la salle des fêtes de Soisy-sous-Montmorency. Venez nombreux !

samedi 15 octobre 2011

LA FEUILLE SUR LE CHEMIN

Le numéro 2 d'octobre 2011 (4 pages) est paru. Une centaine d'exemplaires sur papier en noir et blanc sera disponible. Vous pouvez consulter, télécharger et imprimer la version couleur sur Google docs (via Fichier en haut à gauche). Bonne lecture.

samedi 8 octobre 2011

Journée porte ouverte de la carrière de gypse de Baillet en France


Aujourd'hui une petite équipe de notre association a profité de la journée porte ouverte de la carrière de gypse de Baillet en France qui se situe à quelque quatre-vingt mètres sous terre sous notre Chemin du philosophe en forêt domaniale de Montmorency. C'est avec grand intérêt que nous avons découvert les dessous de notre chemin guidés en cela dans les longues galeries souterraines par le personnel de Lafarge et de Placoplatre  dont les excellentes explications ont passionné l'ensemble des participants. Ce voyage sous terre a constitué une sorte de métaphore de deux au moins de nos stations du chemin du philosophe : l'enracinement et l'homme et son oeuvre.

mardi 4 octobre 2011

Entretien du Chemin du philosophe



Profitant du temps sec, nous avons procédé à l'opération d'entretien annuel de la sculpture en bois "Humanité" de Michel Leclercq installée en juin 2009 sur la station "L'homme et la nature" du Chemin du philosophe. Nous en avons profité pour également nettoyer la station "L'homme et le cosmos", dont les alentours, comme on le constate, ont été sérieusement labourés par les sangliers attirés peut-être par la philosophie.

dimanche 2 octobre 2011

Atelier d'art-nature sur le Chemin du philosophe







Ce dimanche 2 octobre 2011 de 14 h à 17 h, NINA DIAS, artiste peintre, a animé l'atelier"L'art liberté ou art nature" sur le Chemin du philosophe. Cet atelier a été commandité par l'Office National des Forêts et le Conseil Général du Val d'Oise. Une vingtaine de personnes y ont participé, dont des enfants. Les œuvres éphémères réalisées à partir essentiellement des matériaux forestiers ont été construites sur la station du Chemin du philosophe dédiée à "L'homme et son œuvre". Au-delà des performances artistiques, ce fut un agréable moment de rencontre avec de nouveaux amis.

samedi 1 octobre 2011

Compte rendu du café philo du 30 septembre 2011 - populisme







La tentation du populisme en politique



Nous étions une quarantaine de personnes ce vendredi soir 30 septembre 2011 dans ce nouveau lieu abritant notre café philo. Yann, le patron du « Biouti », nous a fort bien accueillis et nous l’en remercions. Après l’ouverture de la séance, consacrée au choix des sujets pour les mois de novembre 2011 et de janvier 2012 (voir plus haut le programme) nous avons abordé, sous l'angle de la philosophie politique,  entre gens de bonne compagnie et avec sérénité, le sujet de « la tentation du populisme en politique ».


Le 15 août 2011 Arte a diffusé l’opéra de Wagner « Rienzi ».

Dans la Rome médiévale, alors que s'opposent les patriciens Colonna et Orsini, surgit l'homme providentiel, Rienzi issu du peuple pour le peuple. Il clame son indignation contre les nobles et l’Eglise ainsi que son engagement pour les libertés. Rienzi, acclamé par le peuple, devient le premier citoyen romain, élevé au rang de Tribun du peuple. Ivre de son pouvoir, il se compromet progressivement dans les jeux politiques et le chaos finit par se réinstaller dans Rome. Il périra dans l’effondrement du Capitole. Pour Wagner, il s'agissait dans cet opéra de jeunesse (créé à Dresde en 1842) d'affirmer la figure d'un démocrate libertaire et révolutionnaire; le compositeur a lui-même participé aux révolutions de 1848 en passant des armes en contrebande.

C'est l'opéra le plus scandaleux de Wagner : Hitler y puisa la révélation de sa mission politique, comme une justification de sa propre destinée ; en Rienzi, le caporal autrichien trouva le modèle du héros libérateur, porteur d'une nouvelle société...

Cet opéra pourrait servir d’illustration de notre thème de cette soirée : « La tentation du populisme en politique ». Il met en exergue les différents ingrédients du populisme et des trajectoires historiques qu’il génère : appel à la vertu, appel au peuple, désignation d’un ennemi de classe, simplification des problèmes, radicalité des solutions. Apparemment Hitler n’a retenu qu’une partie de la leçon de Rienzi, puisque l’opéra se termine, tout comme sa propre histoire, sur le retour à la barbarie, la ruine complète du pays et sur sa propre mort tragique. L’instinct de mort semble roder dans les coulisses du populisme.


Qu’est-ce que le populisme ?

Le populisme désigne un type de discours et de courants politiques, critiquant les élites et prônant le recours au peuple (d’où son nom), s’incarnant dans une figure charismatique et soutenu par un parti. Quelques caractères essentiels sont : il est protestataire, identitaire et nationaliste, autoritaire, démagogique et manipulatoire, moralisateur et nostalgique de l’ordre ancien.


Pourquoi la tentation du populisme ?

Il est simplificateur des problèmes et des solutions tant pour les leaders que pour le peuple. Il se greffe sur des contextes économiques de crise (déclin de l’occident face aux pays émergents). Il s’inscrit aussi dans un contexte de bouleversements des identités nationales, culturelles et religieuses notamment par les migrations. Les dysfonctionnements politiques de la démocratie parlementaire et des institutions européennes engendrent la défiance. La cohésion sociale est bouleversée par les inégalités, le chômage et la misère. La perte des repères moraux en occident engendre un désir de retour vers le passé qu’on pourrait nommer « le populisme patrimonial ».

Le populisme propose des solutions illusoires et dangereuses. Illusoires car les faits sont ce qu’ils sont : modernité, mondialisation, évolution des mœurs, immigration, éducation, information, etc. Dangereuses car le populisme prône l’ostracisme tandis que le plus important c’est le vivre ensemble et le sens de la vie pour chacun.


 Éléments d’histoire du populisme

Les Populares étaient une faction officieuse du Sénat romain dont les partisans étaient connus pour leur programme populiste. Les plus connus, Jules César et César Auguste, ont utilisé les référendums pour contourner le Sénat romain.

Au 16ème siècle la Réforme protestante a été stimulée par certaines formes de populisme. Luther dénonçait les abus de la papauté.

Le boulangisme, le péronisme, ainsi que le poujadisme sont des mouvements populistes des 19ème et 20ème siècles. Le mot populisme connaît un nouveau succès depuis les années 1980, comme synonyme de démagogie ou d'opportunisme politique, surtout lorsqu'il s'agit de mouvements d'opposition. Le populisme a, depuis cette époque souvent été identifié à l'extrême-droite. Pourtant, comme le souligne Michel Winock (historien français né en 1937), le populisme n'est pas spécifiquement d'extrême droite. Le mot désigne une « confiance dans le peuple que l'on rencontre dans les discours de Robespierre ou les écrits de Michelet». Ceux-ci considéraient le peuple comme une entité d’essence mystique.

Vers la fin du 20ème siècle, à la suite de la chute du communisme, de Varsovie à Sofia, la vague populiste s’est abattue sur les pays d’Europe de l’Est et une profonde crise de confiance a frappé leurs institutions politiques.

Stuart Hall (sociologue britannique né en 1932), voit du « populisme autoritaire », dans thatchérisme et blairisme, qui seraient « une forme exceptionnelle de l’Etat capitaliste qui, contrairement au fascisme classique, conserve la plupart des anciennes institutions représentatives, tout en construisant autour de lui un consentement populaire actif » Le « blairisme » est une variante de son prédécesseur, il se résumerait essentiellement à un « populisme d’entreprise, managérial, accompagné d’un style de leadership hiérarchique et d’une attitude moralisatrice vis-à-vis de ses bénéficiaires ».


Gustave Le Bon

Gustave Le Bon (1841-1931), le « Machiavel des sociétés de masse », a publié  « Psychologie des Foules ». Ses idées jouèrent un rôle important au début du XXe siècle. L'ouvrage de Sigmund Freud (1856-1939), « Psychologie collective et analyse du moi », paru en 1921, mentionne les travaux de Le Bon, notamment sur « les modifications du moi lorsqu'il est au sein d'un groupe agissant ». 

Dans un article intitulé « De l'évolution de l'Europe vers diverses formes de dictature » Le Bon prévoit dès 1924 la montée du fascisme par le biais d'un meneur de foules prenant, à la faveur d'événements violents, les rênes du pouvoir et les confisquant ensuite à son seul profit. Si les praticiens du totalitarisme - Mussolini, Hitler, Staline et Mao - passent pour s'être inspirés de Gustave Le Bon, beaucoup de républicains - Roosevelt, Clemenceau, Poincaré, Churchill, de Gaulle, etc.- s'en sont également inspirés. Le Bon considère notamment la suggestion comme l’explication principale de tous les mystères de la domination. Le diagnostic de Le Bon et de Freud est le même : l'autorité traditionnelle, attachée à la fonction, est remplacée par la suggestion pure, qui permet aux chefs de se faire obéir des masses par la seule force de leur personnalité. « Pour de Gaulle comme pour Le Bon, la magie du social tient en un mot : le prestige». (Jean-Baptiste Decherf, De Gaulle et le jeu divin du héros. Une théorie de l'action).

Le Bon a  été le premier penseur à avoir pointé du doigt le danger de la mystique de la supériorité de la race aryenne et condamné par avance la montée du nazisme : « L’Allemand moderne est plus dangereux encore par ses idées que par ses canons », écrit-il en 1918.

Deux idées fondamentales de Le Bon :

1. La tendance des groupes à la soumission à l'autorité se trouve démultipliée dès lors que des événements sont théâtralisés, orchestrés et utilisés par des leaders pour pousser à l'action un groupe qui alors devient "foule".

2. Ce groupe peut être constitué des participants à une assemblée générale, à une manifestation mais aussi à un jury d'assises ou à toute autre forme institutionnelle de réunion.

Les idées de Le Bon se sont trouvées largement vérifiées, ainsi la tendance des masses à se plier à la servitude volontaire. « Le fait que le régime totalitaire, écrit Hannah Arendt (1906-1975), malgré l’évidence de ses crimes, s’est appuyé sur les masses, est profondément troublant." (Les origines du totalitarisme, Éditions du Seuil, 1950)


Pierre Rosenvallon

Pierre Rosanvallon, professeur au Collège de France et président de l'atelier intellectuel « La République des idées », a traité le sujet « Penser le populisme » en introduction des Rencontres de Pétrarque, organisées par le Monde et France Culture en juillet 2011 à Montpellier.

Il y a paradoxe : on exècre le populisme alors que l'on exalte le principe de la souveraineté du peuple.

Le peuple est en crise. Il y a une crise de la représentation. La société ne fait plus corps, elle est disloquée par les inégalités.

Le populisme est à la fois le symptôme d'une détresse réelle et l'expression d'une illusion.

Le 21ème siècle sera peut-être l'âge des populismes comme le 20ème siècle avait été celui des totalitarismes.


Une triple simplification par le populisme :

Premièrement, une simplification politique et sociologique : considérer le peuple comme simplement par la différence avec les élites.

Deuxième simplification : considérer que le système représentatif et la démocratie en général sont structurellement corrompus par les politiciens, et que la seule forme réelle de démocratie serait l'appel au peuple, c'est-à-dire le référendum.

Troisième simplification : celle de la conception du lien social. Il est simpliste de considérer que ce qui fait la cohésion d'une société, c'est son identité et non pas la qualité interne des rapports sociaux. Une identité qui est toujours définie négativement. A partir d'une stigmatisation de ceux qu'il faut rejeter : les immigrés ou l'islam.


Le peuple, nul ne peut prétendre le posséder, nul ne peut prétendre être son unique haut-parleur.

L'important est de donner leur place à ces différents peuples : le peuple électoral-arithmétique, le peuple social, le peuple-principe et le peuple aléatoire.

Électoral : celui qui vote. Social : les différentes communautés avec des expériences et des modes de vie communs. Principe : les règles, constitution communes. Aléatoire : celui des potentialités.

Car la démocratie n'est pas simplement un régime de la décision. Elle est un régime de la volonté générale, ce qui se construit dans l'histoire. Cela implique notamment le fait que l'on soumette les gouvernants à une surveillance accrue, à des redditions de comptes plus fréquentes, à des formes de contrôle. Le citoyen ne peut pas espérer être derrière chaque décision, mais il peut participer d'une puissance collective de surveillance, d'évaluation.

Trouver les moyens de produire un commun qui fasse sens ; produire une société qui ne soit pas une simple collection d'individus. Aujourd'hui, c'est un des problèmes essentiels auxquels nous sommes confrontés.

Une démocratie qui se conçoit à partir de ce qui était au cœur des révolutions américaine et française : la recherche d'une société plus égale.

Il conviendrait donc de redéfinir et de reconstruire la démocratie selon différents plans.

Politique : représentation des citoyens, contre-pouvoirs, contrôle des gouvernants.

Social : répartition et redistribution plus justes des richesses.

Economique : rendre la mondialisation et l’Europe moins « onéreuses ».

Identitaire et culturel : intégration de la diversité culturelle.

Moral : repères, exemplarité des dirigeants.


Réflexions entendues :

-          Le populisme originel est une bonne chose.

-          Le peuple en désarroi a trois solutions, le populisme, la révolte ou l’indifférence.

-          La notion de peuple est floue.

-          Le film de Fellini « Prova d’orchestra » montre la transformation d’un chef d’orchestre séducteur en tyran, puis l’évolution de l’orchestre vers le chaos.

-          On ne parle plus de classes sociales.

-          Chacun peut être populiste.

-          Le peuple est source d’idées dans tous les domaines de la culture.

-          Les moyens de communications actuels contribuent à la personnalisation du pouvoir, mais aussi à l’émergence d’intelligence collective.

-          Les organismes de sondage, de sociométrie et de communication actuels sont de puissants moyens au service du populisme.

-          Le populisme exploite les situations de crise.

-          Le populiste doit convaincre les gens qu’ils sont malheureux.

-          Le populisme s’adresse à l’enfant.

-          Le populisme c’est la séduction, le narcissisme et le slogan.

-          Le populisme pose de vraies questions.

-          Le populisme pose la question de l’éducation populaire.

-          Le populisme, en instrumentalisant la morale et les valeurs, contribue à la perte de repères.

-          Le populisme fait appel à des pulsions archétypales : besoin d’ordre, eros et thanatos, instinct de vie, instinct de mort.

-          Il faut distinguer le et la politique. C’est la politique qui est l’objet des déviances.

-          La crise, c’est la crise des représentations. L’éducation ne suit pas la complexification du monde.

-          Le problème c’est aussi celui de la formation des politiciens. (On peut rappeler que Sciences Po a été créé après 1870 en réponse à l’incurie de la classe politique, qui a conduit à la défaite contre l’Allemagne et la perte de l’Alsace-Lorraine.)

-          Le populisme cherche à diviser, alors qu’il faudrait promouvoir le dialogue.

-          Il faut éduquer les dirigeants au-delà de leurs ambitions personnelles.

-          La situation est grave, nous sommes devant une récession.

-          Ce populisme est un signe terrifiant.

-          En latin, Populus c’est le peuple et le peuplier ; la langue de bois ?

-          L’élite compétente, ce sont les technocrates. Comment les contrôler ?

-          Beaucoup de gens vivent des situations difficiles. Ils n’ont pas le temps de se poser des questions.

-          Il faut un suivi des promesses électorales.

-          Le contre-pouvoir ne doit pas être un faire-valoir du pouvoir.

-          Si le populisme n’existait pas, il faudrait l’inventer.

-          Les promesses non tenues et la langue de bois ont entrainé la perte de confiance.

-          Il faut passer à l’international, ne pas penser seulement localement.

-          L’éducation seule ne peut pas régler le problème du populisme.

-          Les tea parties populistes aux USA sont le fait de nantis.

-          Le populisme est un symptôme. C’est une soupape. C’est la révolte nécessaire.

-          Les populistes ont conduit les peuples à la guerre.

-          Le populisme est différent du fascisme.

-          Aujourd’hui chacun craint d’être déclassé socialement.

-          L’abstention est une plaie sociale.

-          La justice bafouée illustrée par le film « Présumé coupable » est insupportable.

-          L’éducation doit reprendre les fondamentaux de la société.

-          L’immoralité des puissants est un problème. Il semble que la défiance à leur égard soit généralisée dans toutes les sphères de la société.

-          Il faut apprendre aux enfants à réfléchir.

-          Le populisme après tout existe parce qu’il est efficace à court terme.

O  On a parlé du populisme, des populistes, des causes mais pas de ce qui en fait le lit, autrement dit, du "panem et circenses" des romains, des chaines de tv, d'internet où il n'y a pas que de l'honorable, des publicitaires, et de tout le mépris qui y est véhiculé à propos des masses populaires chez nous à notre époque. Par ailleurs il est plus facile de ne pas succomber au populisme à St Germain-des-Prés (7-5-006) qu'à St Denis (9-3). (Précision de Patricia et de Bernard)

        
« Dans ce pays, ils parlent de populisme quand il y a des programmes pour aider les pauvres, mais quand vous aidez des banquiers, c’est appelé du développement. »

        Andrés Manuel López Obrador, homme d’Etat mexicain né en 1953.